Dès son inscription littéraire dans la culture savante au milieu du Siècle des Lumières, la figure du vampire est singulièrement érotisée, en contraste radical avec la tradition populaire qui en faisait un avatar sanguin du simple mort vivant. C’est encore l’érotisme qui sous-tend la prégnance de ce mythe dans l’iconosphère contemporaine, envahie depuis le début du millénaire par une surenchère transmédiatique et véritablement planétaire de vampires. Si les visages vampiriques de Kristen Stewart et Robert Pattinson dans leurs rôles respectifs de Bella Swan et Edward Cullen dominent du haut de leur über-stardom olympien les magazines people de toute la planète, twifans et twihards se comptent par milliers, échangeant sur les réseaux sociaux cybernétiques leurs potins pré, ultra ou post-adolescents au sujet de la saga vampirique de Stephenie Meyer (70 millions de livres vendus et 383 millions de dollars de recettes pour le premier film). L’invasion vampirique est partout déclarée, des grands écrans aux petits (True Blood, The Vampire Diaries, etc.), des jeux vidéos (Vampire: the Masquerade, etc.) aux bandes dessinées (du manga de Maruo Suehiro Vampyre au webcomic LaMortéSisters) des communautés Facebook aux tatouages des tribus urbaines.
L’on peut, à la lumière de ses variations contemporaines, s’interroger sur ce qui constitue aujourd’hui l’érotique du vampire (et ce qui reste de ses invariants), en s’appuyant sur des approches pluridisciplinaires qui vont des études culturelles à la sémiologie, la sociocritique, les études filmiques, la ludologie, les études hypermédiatiques, la mythocritique, l’histoire de l’art, la sexologie, etc.
Dans la plupart des œuvres, la puissance et les capacités surhumaines des vampires sont les éléments mis en valeur dans le récit, mettant l’accent sur leurs forces plutôt que sur leurs faiblesses. Ce n’est toutefois pas le cas de la trilogie de mangas Mars Red, publiée entre 2020 et 2021, scénarisée par Bun-O Fujisawa et dessinée par Kemuri Karakara, qui met de l’avant les faiblesses de cette créature mythique, la considérant même comme un être faible
La culture japonaise est teintée des différents drames historiques qui font d’elle ce qu’elle est aujourd’hui. Le cinéma d’animation japonais est hanté par les souvenirs de guerre, qu’ils soient mis de l’avant de façon historique, dramatique, horrifique ou encore avec une certaine touche de fantastique. C’est avec cette dernière que Blood : The Last Vampire présente Saya, un vampire au féminin qui se plonge en plein cœur de la guerre du Vietnam, au Japon, avec le mandat de tuer l’ennemi de l’État.
L’absence du nom de Jean Rollin à l’hommage aux disparus lors de la dernière cérémonie des Césars apparaît aujourd’hui comme la parfaite illustration de l’incompréhension généralisée d’une œuvre ayant connu un certain regain d’intérêt depuis le décès de l’artiste.
Chez les littéraires comme chez les fans de vampires (les deux catégories se recoupant parfois), la série Twilight (Meyer, 2007 [2005]; 2007 [2006]; 2007; 2008) est souvent considérée davantage comme un plaisir coupable, une lecture inavouable, que comme un réel objet d’analyse.
La pornographie de l’abstinence dont il est question ici est bien sûr celle de Twilight, le grand culte médiatique préfabriqué de ce début de millénaire.
Dès son inscription littéraire dans la culture savante au milieu du Siècle des Lumières, la figure du vampire est singulièrement érotisée, en contraste radical avec la tradition populaire qui en faisait un avatar sanguin du simple mort vivant.