Genre fondé sur le déplacement esthétique de contenus folkloriques et démonologiques préalables, le Gothique, on le sait, a toujours eu partie liée avec la métaréférentialité à travers quantité de topoï dont le plus célèbre reste celui du manuscrit trouvé. Mais c’est dans le sillage de la récupération pop des formules postmodernes que s’est opéré le véritable tournant métafictionnel du genre, plus précisément dans la transition du New Gothic des années 1980 (Angela Carter, John Hawkes, Joyce Carol Oates, Patrick McGrath, etc.) à sa réappropriation et diffusion midbrow, notamment dans l’œuvre de Stephen King (de Misery à Lisey’s Story) et le succès planétaire de la franchise cinématographique des Scream (1996-2011).
Annoncé par une célèbre anthologie intitulée explicitement Metahorror (D. Etchison, 1992), un nouveau regard sur le genre (voire un authentique sous-genre) triomphe désormais, essaimé dans quantité d’oeuvres du tournant du millénaire, allant du Lunar Park de Brett Easton Ellis (2006) au Drood de Dan Simmons (2009), de la saga graphique de Neil Gaiman Sandman (1989-1996) au From Hell (1991-1996) de Alan Moore, du Wes Craven’s New Nightmare (1994) au Cabin in the Woods de Drew Goddard et Joss Whedon (2012). C’est ce tournant méta-horrifique qu’il s’agit désormais d’interroger, à la fois dans ses productions contemporaines et dans l’infléchissement qu’elles opèrent au sein de la double tradition gothique et métafictionnelle.
Le cinéma de Sion Sono a ceci de remarquable qu’il ne se donne pas l’horreur comme fin, mais comme moyen.
Le récit hyper métafictionnel qu’est La maison des feuilles pose dès le début sa construction complexe et labyrinthique.
La scène se situe à New York en 1955. Le jeune William Castle, producteur, réalisateur, se rend au cinéma en compagnie de son épouse.
«Evil Dead Meets Truman Show», disait, lors d’une conférence de presse, l’acteur principal pour présenter The Cabin in the Woods.
Dès son énigmatique prologue, The Cabin in the Woods nous plonge au cœur du complexe militaro-médiatico-industriel états-unien de la main des deux vieux technocrates qui vont servir de relais auctoriel pendant le film, alter egos (voire Doppelgänger) des deux co-scénaristes (Joss Whedon et Drew Goddard) en vieux esclaves du Système (post)hollywoodien.