L’industrie du cinéma populaire indien, ce fameux «Bollywood», est encore très méconnue en Occident et en Amérique. Placée sur la carte occidentale par le couronnement de Devdas (Bhansali, 2002) au Festival de Cannes il y a déjà douze ans de cela, ou encore plus récemment par le succès international de Slumdog Millionaire, film réalisé par le Britannique Danny Boyle, en 2008, Bollywood est pourtant une gigantesque industrie qui produit près de 1000 films par année. Or, c’est à peine si on en entend les minces échos.
Né en 1913 avec Raja Harishchandra, un film muet réalisé par Dhundiraj Govind Phalke, le cinéma indien a maintenant plus d’un siècle d’histoire, d’évolution et d’innovations. Aujourd’hui, il est possible de constater que le cinéma populaire indien, principalement au cours des dix dernières années, témoigne d’une tendance à rendre hommage à son industrie. Fidèle à cette mouvance, c’est-à-dire à la fois furieusement réflexif et totalement pop, Om Shanti Om, réalisé par Farah Khan en 2007, reprend une structure narrative spéculaire déjà connue du cinéma indien, le récit de réincarnation. Toutefois, si cette étude s’arrête à un cas précis, elle ne peut qu’ouvrir la porte à de plus amples recherches dans le domaine du cinéma sud-asiatique et encourager la diffusion d’un cinéma qui mérite d’être découvert… Because it’s not the end, my friend, it’s only the intermission. The film is not over yet.
En 2007, Om Shanti Om, réalisé par Farah Khan, est projeté dans les salles de cinéma de l’Inde. Om Shanti Om raconte sa propre histoire. Celle d’un jeune homme fou d’amour pour une actrice, d’un jeune homme qui mourra en tentant de sauver sa belle des griffes de la mort, et qui, une fois réincarné, se jure de venger l’amour de sa vie. Om Prakash est un jeune acteur mineur qui tente de percer dans l’industrie du Bollywood des années 1970, le cinéma –parfois péjorativement nommé– masala1. Amoureux d’une actrice vedette, Shanti, Om fait tout pour la rencontrer et la courtiser. Or, Shanti est secrètement mariée à un jeune producteur ambitieux, Mukesh, et enceinte de lui. Ce dernier détail met en péril la carrière de Mukesh qui décide de se débarrasser de Shanti en la brûlant vive à l’intérieur du décor de sa nouvelle production qu’il avait conçue pour elle et qui ne verra jamais le jour, Om Shanti Om. Om est sur les lieux et tente de sauver Shanti des flammes, en vain. Projeté à l’extérieur du studio par une déflagration, Om est heurté par la voiture d’un acteur célèbre, Rajesh Kapoor, qui se rendait d’urgence à l’hôpital pour que sa femme puisse accoucher. Om Prakash meurt au même moment où naît Om Kapoor, fils de Rajesh Kapoor.
Au détour d’une ellipse, le spectateur est porté au début des années 2000, soit trente ans après le drame. Om Kapoor, réincarnation physiquement identique d’Om Prakash, fête son trentième anniversaire. Acteur vedette de l’heure, Om, surnommé OK, prendra conscience, au fil des événements qui suivent son anniversaire, de sa vie antérieure et du meurtre de Shanti. Il fera tout en son pouvoir pour démasquer Mukesh qu’il convainc de relancer le projet de production d’Om Shanti Om. Om fera aussi la rencontre de Sandy, jeune actrice inexpérimentée, réplique physique exacte, elle aussi, de la Shantipriya disparue. Avec l’aide de Sandy, incarnant le fantôme de Shanti, Om tente de tirer les vers du nez de Mukesh et de venger sa morte bien-aimée. Or, c’est le spectre réel de Shanti qui révèle l’endroit où repose le cadavre dissimulé de l’actrice et qui détruit Mukesh le meurtrier.
Cette étude d’Om Shanti Om se divisera en trois volets2. Dans un premier temps, nous observerons comment le récit de réincarnation, comme dispositif métafictionnel, engendre l’effet spéculaire d’un double récit. Partant de cette analyse d’un cas précis, nous serons en mesure de présenter brièvement la structure narratologique du film populaire indien de manière plus générale afin de montrer comment, lui aussi, peut être spéculaire. Dans un deuxième temps, nous étudierons comment Om Shanti Om fonde un discours fort sur la construction des icônes cultes et le star system tel qu’il est fantasmé par la culture des fans. Nous explorerons donc l’univers du fandom bollywoodien et le pouvoir, à la fois politique et spirituel, de la star de cinéma, phénomène intrinsèque à l’industrie depuis ses premiers balbutiements au début du 20e siècle. De plus, le film de Farah Khan se veut un grand hommage à l’industrie Bollywood des années 1950 à aujourd’hui à travers plusieurs citations visuelles, musicales ou chorégraphiées et par un nombre effarant de caméos d’acteurs et d’actrices du cinéma populaire indien. Cette partie de notre étude nous permettra de constater la tendance qu’a le cinéma indien à rendre hommage à son industrie depuis le début des années 2000. Finalement, Om Shanti Om présente tout un discours sur la construction d’un récit cinématographique. On y trouve l’idée d’un Scénariste-Dieu, d’un Destin déjà rédigé, filant la métaphore de la vie comme étant un film. Om Shanti Om est aussi montré comme un film fantôme, une production cinématographique servant d’instrument de vengeance.
Le récit de réincarnation fonctionne selon le principe d’un double récit, le récit de deux vies qui se répondent et se construisent l’une et l’autre dans un effet de miroir, de spécularité.
Dans la plupart des cas, le récit de réincarnation se lit à la manière d’un récit policier: la vie antérieure se révèle aux personnages principaux à partir d’indices perçus au sein de leur vie actuelle. Tout comme le récit policier, c’est souvent l’histoire d’un meurtre, ou du moins d’une fin tragique, qui est lentement reconstruite. Histoires d’amour brutalement arrêtées, suspendues, qui tentent de reprendre leur cours à travers la réincarnation, et dont la motivation se révèle parfois être la vengeance du protagoniste envers son meurtrier ou, comme dans le cas de Om Shanti Om, le meurtrier de sa belle.
Selon la religion hindouiste, l’être humain se dissout à la mort, mais son karman, lui, entraîne une nouvelle naissance, une nouvelle vie qui héritera des actes (bons ou mauvais) de l’existence antérieure. C’est l’âme incarnée ou jivatman qui s’attribue une renaissance ou, du moins, peut atteindre la libération (moksha) si elle dénoue les liens qui l’attachent à l’existence temporelle transitoire. La croyance d’une réincarnation après la mort fait office d’idéologie de consolation3 dans plusieurs mélodrames et tragédies cinématographiques indiens.
S’ajoute à cette idéologie un mantra répété qui, à lui seul, peut nouer toute l’intrigue: on ne peut aimer qu’une seule fois dans une vie4. C’est pourquoi on peut assister dans certains films à cette promesse du héros face à la femme qui l’aime alors que lui est éperdument amoureux d’une autre: «Dans une vie prochaine, si le destin nous réunit, je ne pourrai pas te refuser.» (Bhansali, 2002: 2:43:45).
D’ailleurs, le samsara, dans l’hindouisme, se définit de plusieurs façons: il est, tout d’abord, le cours commun de rivières après leur confluent; il est le mouvement circulaire de la conscience divine dans l’espace et dans le temps; il est la ronde des naissances et des morts, ce cycle de réincarnations successives; il est, finalement, la vie dans le monde de la multiplicité.
Prenons le cas de Om Shanti Om et voyons comment le récit de réincarnation reconstruit un récit primordial en un autre récit à partir, entre autres, d’une reconstruction identitaire basée sur l’inversement des paradigmes principaux, la reprise de motifs visuels, sonores ou musicaux et sur ce qui s’apparente à la notion des lieux de mémoire telle qu’évoquée par Pierre Nora qui affirme que «les lieux de mémoire, ce sont d’abord les restes. La force extrême où subsiste une conscience commémorative dans une histoire qui l’appelle, parce qu’elle l’ignore.» (Nora, 1984: XXIV).
Le spectateur est tout d’abord plongé, dans la première partie du film, dans l’histoire d’amour tragique d’Om Prakash. Om rêve d’être une vedette et idolâtre Shantipriya. Or, Shanti est assassinée par Mukesh Mehra; elle périt dans les flammes. Om, quant à lui, succombe à ses blessures après avoir tenté, en vain, de sauver sa bien-aimée. La mort des deux amoureux qui ne furent jamais réunis est l’élément clé de la diégèse, la pierre angulaire du récit de réincarnation.
Cette coupure, précédant le second récit, rappelle cette «Intermission», présente dans la grande majorité des productions cinématographiques de l’industrie Bollywood. Pause dans un film qui, jusqu’à tout récemment, flirtait avec les trois heures de récit, l’entracte est normalement précédé d’une révélation, d’un certain climax qui bouscule l’ordre établi de la première partie du récit et relance l’action de la seconde part de l’histoire racontée5.
L’intermission marque aussi régulièrement une ellipse, le passage entre un récit du passé laissé sans résolution et le présent qui dénouera les tensions et les conflits créés dans la première partie.
Une majorité de films indiens populaires sont, en effet, construits à partir d’une analepse. La première moitié du film présente au spectateur un personnage qui apprend un événement du passé (la rencontre amoureuse de deux autres personnages, par exemple). Par une analepse, le spectateur est plongé dans le récit raconté et assiste aux amours tourmentées du couple en question. Cette histoire est souvent inachevée, laissée en suspens dans un climax déchirant et le spectateur se retrouve de nouveau au temps présent, où le personnage qui écoutait/lisait l’histoire passée, prend la décision de rétablir l’ordre dans l’histoire inachevée dont nous venons d’être le témoin. L’entracte scelle cette décision et la seconde partie du film nous présente la résolution des conflits passés6.
Dans le récit de réincarnation, bien que ce soit aussi vrai de la plupart des autres films bollywoodiens, à la manière d’un miroir, les deux parties du film se répondent et les deux vies présentent nombre de similarités7. Or, suivant une certaine logique à la fois spirituelle et spéculaire, les paradigmes principaux de la première partie se trouvent inversés dans la seconde moitié du film. La mise en abyme est définie par Lucien Dällenbach dans Le Récit spéculaire comme étant «toute enclave entretenant une relation de similitude avec l’œuvre qui la contient» (Dällenbach, 1977: 18). Or, Om Shanti Om ne se lit pas tant comme un enchâssement de récits, mais comme une suite d’événements qui reflètent la même histoire, à la manière d’un ruban de Möbius. Christine Couleau écrit d’ailleurs dans un article au sujet de l’esthétique du ruban de Möbius au cinéma:
Il suffirait de coller ensemble ces deux extrémités inversées pour obtenir une boucle infinie, à l’image du ruban de Möbius. La distinction entre rêve et réalité n’a plus lieu d’être, car ils sont les deux actualisations complémentaires d’un même cycle, avers et revers d’une même histoire sans cesse recommencée. (Couleau, 2002: 244)
Ce qui peut alors sembler être un effet miroir entre la vie et la nouvelle vie d’Om s’inscrit plutôt dans une continuité réitérative, à la manière du samsara.
Dans Om Shanti Om, si la première partie nous présente le couple formé d’une actrice célèbre et d’un acteur mineur, Shanti et Om, les 97 minutes suivantes nous montrent à l’inverse l’acteur vedette OK et la jeune et inexpérimentée Sandy, les rôles étant bien sûr attribués aux mêmes acteurs que dans la précédente moitié, Shahrukh Khan et Deepika Padukone. La spécularité du récit se construit donc à partir d’un parallélisme réitératif à la fois iconographique et sémantique. Plusieurs dialogues prononcés dans la première partie du film se trouvent répétés à travers la reconstruction identitaire d’Om.
Cette reconstruction mémorielle se fait à partir de trois moments charnières. Tout d’abord, Om Kapoor se retrouve, au cours du tournage d’un film de superhéros, sur les lieux de son drame antérieur, les studios où Om Prakash rêvait d’une vie de star. Un sentiment de déjà-vu assaille le jeune homme qui entend en écho les voix qui habitent les souvenirs liés à l’endroit visité, extraits sonores repris de la première partie du film. Le tournage du film arrêté brusquement par une averse, OK se réfugie dans un bâtiment du studio. Des éclats de voix le mènent à l’ancienne loge de Shantipriya. OK se trouve alors au cœur de la discussion entre Shanti et Mukesh qu’Om Prakash avait épié trente ans plus tôt. Ce souvenir, qu’OK ignore encore être le sien, se matérialise en une immersion virtuelle.
OK se promène entre ces deux personnages qui ne le voient pas et dont il n’entend pas les paroles. Le décor et les projections qui se déploient autour de lui sont brouillés, translucides, rappelant à la fois l’esthétique de la vieille pellicule filmique, mais aussi celle du palimpseste.
OK est témoin de cette faille dans la matérialité de son univers filmique, ces images fragmentées d’un film antérieur, d’une vie antérieure, puisqu’on assiste, en tant que spectateurs, à une superposition numérique d’un extrait de la première partie du film sur la seconde. La scène s’estompe lorsqu’OK croise le regard d’Om qui, caché dans une pièce adjacente, observe la scène à travers une grille d’aération. En sortant du studio, OK retrouvera aussi une boule de cristal, la même que Shanti avait offerte à Om en gage d’amitié.
Ces scènes de reconstruction identitaire d’OK sont suivies d’une longue séquence parodiant les Filmfare Awards (l’équivalent des Oscars américains), séquence sur laquelle nous reviendrons plus tard en ce qui concerne son caractère parodique. Établissant le parallèle entre l’âme incarnée et le travail de l’acteur, le discours de présentation du prix se lit comme suit: «A good actor brings out somebody else’s soul into his soul and projects the right kind of emotion and the good actor is Om Kapoor.» (Khan, 2007: 1:36:14) En allant chercher son prix sur la scène, Om Kapoor est assailli par des images-souvenirs d’Om Prakash et de Pappu, saouls après la première de Dreamy Girl, s’amusant à recréer la cérémonie des prix en travestissant le Filmfare Award en Bottle Award. Les images-souvenirs qui traversent l’esprit d’OK sont, tout comme les fragments mémoriels précédemment évoqués, des extraits de la première partie, dont la texture est modifiée, leur donnant l’apparence d’un vieux film.
OK répétera l’écho de la voix d’Om Prakash en reprenant mot pour mot le discours que ce dernier avait fait devant les gamins de la ruelle. La caméra qui s’était momentanément tournée vers le public revient sur OK, alors affublé du costume rouge d’Om, de son peigne et de sa bouteille. D’ailleurs, le discours d’Om/OK se clôt ainsi:
Thank you for making me believe that, just like in our films, in life too, finally, in the end, everything is ok. Happy endings. And if it is not happy, then it’s not the end, my friend. It’s only the intermission. The film is not over yet. (Khan, 2007: 1:38:45)
Cette scène, en plus de marquer un pas de plus vers la pleine conscience d’OK de sa vie antérieure, illustre, d’une certaine manière, la conscience que le personnage a de l’état de la situation narrative du film dont il fait partie, par le biais de cette conception de la vie comme film.
À la fête organisée pour son anniversaire –une longue scène/chanson intitulée Deewangi Deewangi, sur laquelle nous reviendrons– OK fait la rencontre de Mukesh. Au moment où il l’aperçoit, OK se souvient de tout. Marquant la fusion des deux Om, les images-souvenirs qui se bousculent dans la mémoire d’OK mettent en scène Shanti, Mukesh, mais aussi la mère d’Om, Pappu et Om lui-même. C’est alors qu’Om assumera sa véritable et double identité. Edgar Morin, dans Les stars, affirme que «le héros mythologique rencontre la mort dans sa quête de l’absolu. Sa mort signifie qu’il a été brisé par les forces du monde, mais, en même temps, par sa défaite, il accède ultimement à l’absolu: l’immortalité.8» (Morin, 1960: 142). Ceci fait écho à la nécessité d’une fusion des deux Om dans le but de créer ce «héros idéal» qui passe par la mort et la renaissance.
L’effet spéculaire du récit, visible à partir du parallélisme de certaines scènes, est aussi accentué par la musique qui identifie la similarité entre les passages inversés des deux récits. Ainsi, lorsqu’OK rencontre Sandy –Sandy étant une immense fan de OK– la chanson Ajab Si, qui avait précédemment joué lors de la rencontre entre Shanti et Om, identifie la similarité entre les deux scènes. Ces rencontres se concluent d’ailleurs de la même façon, le/la fan perdant connaissance devant la proximité de son objet culte, la star.
Pour lire la suite: Méta-Bollywood (2): Icônes cultes et fantasmes de fans.
1. C’est l’industrie cinématographique des années 1970 qui a introduit le mélange des genres au sein d’un même film. Avant cet âge d’or du film indien, Bollywood produisait beaucoup de films mythologiques et historiques. Le mélange des genres a alors permis d’aller chercher un public très large, plus familial. Le cinéma masala offrait des films où chacun y trouvait son compte; l’action, la comédie, la romance et la spiritualité étant rassemblées sous une seule enseigne, en un seul film (de plus de trois heures). L’appellation masala fait alors référence à ce mélange d’épices à la fois douces et pimentées utilisées en cuisine, illustrant parfaitement ce mélange des genres.
2. Les trois volets sont les suivants: Om Shanti Om (1): le récit de réincarnation comme construction spéculaire; Om Shanti Om (2): Icônes cultes et fantasmes de fans; Om Shanti Om (3): Le récit d’un film fantôme.
3. Bien qu’étant un concept purement occidental, l’idéologie de consolation (Umberto Eco) est le concept qui illustre le mieux l’effet que joue la promesse d’une vie prochaine pour le héros où ses maux présents, qui fondent le récit, seront annihilés. C’est l’idée d’un monde de possibilités qui s’ouvre à l’imaginaire du spectateur qui peut alors reconsidérer toutes les variations possibles de la vie des personnages. La promesse de réincarnation est donc une idéologie de consolation qui travaille de pair avec la catharsis aristotélicienne. Alors que le héros meurt, les deux mécanismes s’enclenchent et le spectateur pleure, tout en souriant, rassuré par cette promesse de réincarnation.
4. Martelée de film en film depuis le tout début du cinéma indien, cette affirmation a longtemps été une vérité immuable, incontestée et allant tout à fait de soi. Or, si les années 1990 et même le tout début des années 2000 ne remettaient toujours pas en question cette loi implicite du récit, cette image figée de l’amour unique s’est transformée au cours de la première décennie du 21e siècle et on peut désormais constater que cette immuable vérité devient plutôt le fantasme d’un amour idéal impossible et souvent moqué par une toute nouvelle génération de personnages, jeunes adultes conscients du discours sur l’amour véhiculé par le cinéma si différent de leur réalité.
5. Le film typique bollywoodien comporte deux climax: avant l’intermission et à la fin du film. Le premier climax est de l’ordre du tragique ou du coup de théâtre. L’intermission est souvent précédée par la révélation-choc de l’identité réelle d’un personnage (Mohabbatein, 2000) ou de l’état de santé précaire du héros, présageant sa mort imminente (Kal Ho Naa Ho, 2003). Le second climax est plutôt cathartique. C’est le moment ultime où les conflits noués au premier climax seront résolus.
6. Ainsi, un jeune homme décide de retrouver son frère renié par son père à cause d’un mariage d’amour (Kabhi Khushi Kabhie Gham, 2001). Une petite fille décide de retrouver la meilleure amie d’enfance de son père, désormais veuf, afin de les réunir (Kuch Kuch Hota Hai, 1998). Une jeune femme intrépide décide de faire un film sur un désamorceur de bombes au passé tourmenté dont elle vient de lire le journal intime (Jab Tak Hai Jaan, 2012). Une avocate décide de défendre un prisonnier après avoir entendu le récit prouvant son innocence (Veer-Zaara, 2004).
7. En effet, même dans le film à structure analeptique, la seconde moitié réactive la première partie du récit, reprenant régulièrement les mêmes motifs et présentant des scènes parallèlement similaires; le passé étant donc réactualisé dans le présent.
8. (Je traduis.)
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