Au début de Back to the Future (Robert Zemeckis, 1985) nous découvrons, au crépuscule, la maison du héros, Marty McFly, lycéen et punk en devenir, avec ses autres occupants: son père, geek asocial, soumis à son patron abusif et tyrannique; sa mère housewife dépressive et alcoolique; son frère, looser employé de fast-food; sa sœur, frustrée, qu’on devine future housewife alcoolique elle-aussi. Bref, une famille petite-bourgeoise typique, en voie de prolétarisation avancée, dont le modèle a été usé par la dépression économique et morale des Seventies. À l’inverse, durant l’épilogue, au retour de son voyage temporel en 1955, Marty découvre que cette famille et son intérieur dépressifs ont disparus, comme par magie, ce que souligne le leitmotiv musical de Jerry Goldsmith. Ils ont été «relookés» et remplacés par leurs sosies, clichés petits-bourgeois de publicité, conformes à l’injonction de réussite des Eighties: le père est devenu un auteur à succès de science-fiction, la mère une femme au foyer rayonnante, la sœur une jeune femme sexuellement accomplie et le frère un golden boy, génération Patrick Bateman, qui lit le magazine économique pour cadres supérieurs Forbes, en prenant son petit déjeuner aux aurores.
Mise à part l’ironie pour le moins ambiguë du film, quoi de différent avec la fameuse campagne télévisée pour la réélection de Reagan de 1984, laquelle s’ouvrait par ces mots, jouant du littéral à l’image et de la métaphore: «It’s morning again in America»? Pour reprendre les quatre grandes catégories du récit – fortune, infortune, ignorance, savoir –, le héros de Back to the Future emploie son savoir de teenager des années 1980, principalement historique et culturel, pour corriger les infortunes de sa famille. Dans les deux cas, un storytelling positif a été reconquis. À travers le voyage dans le temps, Back to the Future, métaphorise ainsi la revitalisation reaganienne qui s’opère par un retour nostalgique à l’âge d’or des Fifties. Ce à quoi nous assistons alors est, à la lettre, une opération narrative de substitution, un révisionnisme historique, puisque les voyages temporels du film opèrent l’ellipse de la période trouble de «perte d’innocence» de l’Amérique, laquelle s’étend de 1963, assassinat de Kennedy, escalade de la guerre du Vietnam et de la contestation, à 1980, élection de Ronald Reagan.
À propos de la sortie de son film American Graffiti (1973), George Lucas témoignait de cette tendance nostalgique, ingénument et peut-être à son corps défendant, mais non sans un certain sens de l’histoire, de ses évènements et de ses dates:
Cela devenait déprimant d’aller au cinéma. J’ai décidé de faire un film qui fasse du bien aux gens pour qu’ils se sentent mieux en sortant du cinéma. Je me suis rendu compte que la jeune génération était perdue. Les gens ne faisaient qu’une seule chose, s’asseoir dans un coin et se défoncer. Je voulais retrouver le sens de ce qu’était l’adolescence pour une certaine génération d’Américains, disons de 1945 à 1962. [1]
Il ne faut pourtant pas repeindre la nostalgie d’American Graffiti avec les couleurs reaganiennes de Back to the Future puisque la période bénie, donnée à revivre dans le film de Lucas, est bien un temps clos, perdu, et donc objet d’une mélancolie [2]. Dans Back to the Future, le basculement américain vers les Eighties se signale au contraire par une substitution fantasmagorique qui corrige les années 1980, au point d’en proposer une version alternative. Le passage nostalgique par les années 1950, quant à lui, est débarrassé de ses ersatz mélancoliques puisque Marty n’a pas connu les années 1950. L’enjeu du film n’est donc pas un apprentissage qui procéderait par la perte des illusions mais celui d’une régression corrective qui permet, in fine, de retrouver une forme d’innocence et de virginité. Si l’on y pense sérieusement, c’est bien une cannibalisation, de surcroît eugéniste, que met joyeusement en scène le film Back to the Future. On y dévore (temporellement) les siens pour remplacer sa famille dégénérée par une famille modèle.
L’enjeu dramatique du genre survival, où Marty doit rabibocher ses parents pour assurer sa propre conception, après avoir interféré dans leur rencontre, masque son dédoublement cannibale plus prosaïque: la substitution nécessaire de sa famille en déclin par une famille petite-bourgeoise de winners, où l’autorité patriarcale retrouvée donne les moyens d’offrir à Marty la voiture de ses rêves, tandis que la matriarcat initial, incapable de trouver une issue sociale au désir, n’était bon qu’à refouler la sexualité familiale dans une légende et un ordre puritains. Au contraire, l’achat de la voiture, imagine-t-on, permettra à Marty d’emmener sa petite amie, Jennifer (Claudia Wells), dans une bucolique ballade au lac, sabotée au début du film, ballade où, logique de teen movie oblige, Marty pourra être dépucelé, lui et Jennifer pourront consommer leur amour et ainsi assurer leur propre descendance, biologique et sociale. Le survival sert ainsi prétexte au born again.
En place de l’exo-cannibalisme de Patrick Bateman, dont la révélation ne se fixait pas, le cannibalisme de Marty McFly est donc d’abord un endo-cannibalisme. Il s’attaque avant tout aux siens, pour les réparer (to fix, en anglais) via la fixation d’un âge d’or, les Fifties [3]. Voir, à titre de comparaison, le film de Francis Ford Coppola, Peggy Sue Got Married (1986). Le héros y est une héroïne, l’adolescent une adulte qui voyage dans son propre passé (l’année 1960) pour faire un apprentissage inverse à celui de Marty: on ne peut pas corriger le passé, mais les choix et leurs conséquences peuvent faire l’objet d’un réenchantement qui n’exclue pas les désillusions initiales. Si, en place de Marty, c’était sa mère, Lorraine (Lea Thompson), la morale de l’histoire eut donc été différente.
Là où l’endo-cannibalisme tribal affirme une continuité entre la vie et la mort des générations et concrétise la dette payée aux ancêtres, la cannibalisation nostalgique des Eighties, à l’œuvre dans Back to the Future, affirme quant à elle une continuité contrariée qui rejette la dette aux anciens. La dévoration temporelle ne sert, en effet, pas à absorber l’énergie des ancêtres, pas plus qu’elle ne sert à assurer avec eux une filiation traditionnelle. Elle sert, au contraire, à dénier la filiation, à la réinventer, en substituant à la génération précédente des sosies corrigés selon le désir des derniers-nés. De son premier voyage, Marty n’apprend donc rien, ou presque, sinon que la légende ressassée par sa mère au début du film, celle de son adolescence prude et de sa rencontre idyllique avec son père dans les années 1950, était bien éloignée de la vérité, puisque tout le sous-texte sexuel en était soustrait. Cette légende méritait bien d’être corrigée par une autre légende, au mépris, dans les deux cas, de l’Histoire et de ses perdants.
Voir, à titre de contre-exemple cette fois, le film de David Lynch, Blue Velvet (1986). Le voyage temporel d’abord y est plus trouble; difficile en effet de savoir si le film se déroule dans les Fifties ou les Eighties, ou bien un dérangeant mélange des deux. Le héros, lui-aussi, y suit une piste musicale, historiquement significative mais plus et moins fantasmagorique à la fois. Le film s’ouvre, en effet, avec une version de la chanson «Blue Velvet» interprétée par Bobby Vinton, datant de 1963, plutôt que la version originale, interprétée par Tony Bennet, datant de 1951, ce qui la situe dans l’inconscient musical et la mémoire collective américaine au point critique de l’année de l’assassinat du président John Fitzgerald Kennedy. Plutôt que de purger le présent en réparant le passé, Lynch laisse donc transpirer le trauma, au cœur même de son effacement dans la dialectique reaganienne des Fifties et des Eighties [4]. Il l’évoque ainsi:
Les années cinquante sont toujours là. Tout autour de nous. Elles n’ont jamais disparu. C’était une décennie merveilleuse à bien des égards. […] Il y avait donc quelque chose dans l’air qui n’existe absolument plus. [… ] L’avenir était radieux. Nous n’étions absolument pas conscients de jeter les bases d’un futur désastreux. Tous les problèmes existaient déjà, mais on glissait dessus; on ne les voyait pas. Puis tout le lustre est parti, tout a pourri, et ça a commencé à suinter. [5]
Blue Velvet est alors aussi bien un apprentissage onirique, social et sexuel, permis par la défaillance du père du héros, Jeffrey (Kyle MacLachlan), qui s’engage dans l’aventure en découvrant une oreille trouvée dans l’herbe d’un terrain vague, véritable entre-deux des espaces et des temps de l’Amérique.
En matière d’apprentissage, il faut attendre une deuxième revitalisation dans le troisième opus, Back to the Future Part III (1990), et le détachement de son père de substitution (le Dr. Emmett Brown, Christopher Lloyd), qui risquait de fixer Marty à un stade infantile, pour que l’adolescent se libère de sa virilité défaillante, inspirée par contraste avec la lâcheté de son père biologique original, défaillance qui le poussait à répondre mécaniquement par la violence à toute provocation («Chicken?»). Louable mais finalement maigre morale pacifique acquise par le personnage – tendre l’autre joue plutôt que d’opter pour œil pour œil, dent pour dent – laquelle morale légitime et recouvre la cruauté de sa cannibalisation. Marty McFly, à la différence de Patrick Bateman, fatalement violent et malheureux, n’en ressemble pas moins au Reagan décrit par Ellis: s’il paraît si normal, si inoffensif, c’est qu’il a cannibalisé son passé, au point que l’intérieur, la vérité et l’authenticité ne comptent plus.
En définitive, le cannibalisme de Marty contient peut-être aussi une forme larvée d’exo-cannibalisme: il ne dévore pas seulement les siens, il fait disparaître l’altérité qui menaçait la reproduction du même; derrière la famille petite-bourgeoise modèle, il fait disparaître la famille prolétaire en germe, sa vulgarité, sa violence et sa destinée white trash. Exemplairement, son frère blue collar de fast-food est remplacé par la figure du manager–trader, et Marty lui-même, punk en devenir, devient l’emblème de la re-generation reaganienne: un adolescent consumériste et désormais acquis à la fable conservatrice. À cet égard, la fable néo-libérale reprend au récit marxiste sa structure: évacuez le lumpen et la Révolution adviendra [6]. Mieux, renchérit le reaganisme: eugénisez-les et la Régénération adviendra. C’est ce que rappelle Rancière:
Au xixe siècle, Marx et Engels stigmatisaient ces artisans et petits-bourgeois attachés à des formes sociales dépassées qui résistaient au développement du capitalisme et retardaient ainsi le futur socialiste dont il était porteur. À la fin du xxe siècle le scénario a été revu pour en changer non la forme mais les personnages. [7]
Back to the Future n’est donc pas seulement le film le plus reaganien qui soit, il est sans nul doute le chef-d’œuvre et l’abrégé du régime historique de cannibalisation reaganisme.
Le néo-libéralisme triomphant des Eighties a beau prétendre être un cosmos, une cattalarchie, néologisme du père du néo-libéralisme Friedrich Hayek, c’est-à-dire un ordre spontané et moderne produit par le marché, plutôt qu’une économie renvoyant à l’oikos, au foyer, à la famille et son patriarcat, exerçant un savoir-faire traditionnel de la domination sur l’épouse, les enfants et les esclaves, ce que montre la confrontation d’American Psycho et de Back to the Future, c’est qu’il est en réalité les deux à la fois dans le reaganisme: le cosmos mécanique d’une gouvernementalité désincarnée dans la finance (American Psycho) et le nouvel oikos d’une soumission à une gouvernementalité managériale dont le paternalisme est régénéré (Back to the Future).
On reprochera sûrement à une telle lecture de plaquer l’idéologie reaganienne sur le film de Zemeckis. Mais le film lui-même, dans son scénario et jusque dans son casting, s’est pensé dans cette filiation, ainsi que le rappelle Michael D. Dwyer, pour le choix de Michael J. Fox dans le rôle de Marty McFly:
Even before he starred in Back to the Future, Michael J. Fox had come to represent a generation of aspiring yuppies. This was largely due to his performance as Alex P. Keaton on the NBC sitcom Family Ties (1982-89). […] Alex has a poster of William F. Buckley [8] hanging over his bed and loses his virginity after attending a Milton Friedman [9] lecture […] In many ways, Alex embodied the attitudes of a new generation that was much more interested in scoring big on Wall Street […] He was so vital to Zemeckis and Gale’s vision of Back to the Future, in fact, that he was cast twice.[10]
Le deuxième volet de la série de films, lui-même, dévoile cette alliance des contraires – néo-libéralisme et conservatisme autoritaire[11] – comme son refoulé. Back to the Future Part II expose la version dystopique de sa chronopolis de 1985, sous la domination de Biff Tannen (Thomas F. Wilson), devenu caricature du Donald Trump des années 1980. C’est là le second apprentissage par lequel en passe Marty, outre la violence déjà évoquée et résolue dans le troisième opus: il doit se purger de la cupidité des Eighties, celle-là même qui lui fait acheter l’almanach des sports en 2015, lequel tombe, plus tard, dans les mains de Tannen-Trump.
Il est notoire, à cet égard, que Back to the Future Part II emprunte sa structure au film It’s a Wonderfull (Frank Capra, 1946), et que les deux versions de Hill Valley, utopique et dystopique, renvoient à celles de Bedford Falls. Mais plutôt que la morale reaganienne, celle de Capra, marquée par la crise de 1929, renvoyait au Welfare State rooseveltien. George Bailey (James Stewart) y reprenait la mutuelle de crédit immobilier de son père, permettant aux familles modestes de la ville d’accéder à la propriété; il luttait ainsi contre la cupidité du banquier Henry F. Potter. Bailey finissait par se voir récompensé pour une vie de sacrifice au profit des autres. Au contraire donc de cet ouverture progressiste sur la communauté, l’eugénisme par lequel en est passée la cellule familiale du premier Back to the Future demeure dans les suivants épisodes: elle est le résultat d’une pulsion individualiste et consumériste du héros, justifiée dès lors qu’elle figure le véritable objet d’apprentissage du teen movie, et dès lors qu’elle se dépouille de ses excès – la violence et la cupidité –, en réalité consubstantiels, ainsi que les films eux-mêmes le mettent en scène. Pour se justifier d’une morale qui garantit son bon fonctionnement, la cattalarchie néo-libérale doit préserver la légende d’un oikos reaganien. Son absence explique pourquoi la psychose de Bateman est ratée et aliénée, tandis que celle de Marty est réussie et saine.
Certaines analyses relèvent, quant à elles, une autre exo-cannibalisation à l’œuvre dans Back to the Future, sous la forme de l’appropriation culturelle[12]. Deux scènes viennent à l’appui de cette thèse. D’abord, celle du bal lycéen de 1955, où Marty manie l’anachronisme en interprétant la chanson de Chuck Berry «Johnny Be Good», écrite plus tard en 1957. De cette manière, l’invention du rock’n roll reviendrait symboliquement aux Blancs, plutôt qu’aux Noirs américains. Chuck Berry, contacté dans le film au téléphone par un musicien pour qu’il entende tout-fait le son qu’il était encore en train de chercher alors, serait donc spolié de sa découverte, cannibalisé. Séduisante, cette thèse n’en est pas moins excessive puisque le film rappelle clairement, pour le spectateur auquel il est destiné, que Chuck Berry est bel et bien le véritable inventeur du rock’n roll.
Plus perverse, la seconde scène, très courte, voit Marty suggérer à un personnage secondaire afro-américain, Goldie Wilson, relégué aux basses tâches de ménage du Lou’s Cafe en 1955, de se faire élire plus tard, en 1985, maire de Hill Valley. Non seulement l’idée vient symboliquement du Blanc plutôt que du Noir et de son apprentissage, traversant les infortunes de la ségrégation, pour acquérir un savoir militant, mais c’est surtout le mouvement pour les droits civiques, politique et collectif, qui se voit ainsi réduire à une dynamique néo-libérale de volonté individuelle. Au surplus, la reprise de la chronopolis duelle de Capra était en réalité sensible dès le premier opus, où la version originale de Hill Valley en 1985 avait tout de la cité en déclin: déchets jonchant le trottoir, SDF, graffitis, films pornographiques à l’affiche, magasins de prêteurs sur gage et autres enseignes miteuses, le tout cristallisé par l’hôtel de ville, devenu un centre de services sociaux: autant de signes de déchéance, rattachés au maire afro-américain, Goldie Wilson, qui fait alors campagne pour sa réélection.
Une dernière scène, quant à elle, propose un argument à décharge. Dans la version dystopique de 1985 de la chronopolis californienne, la famille de Marty a, cette fois, été remplacée par une famille afro-américaine, substitution qui suggère que la fatalité sociale ne s’applique pas de la même manière aux afro-américains. Reste dans tous les cas qu’à force de cannibaliser, Back to the Future refuse la créolisation de son personnage[13], son devenir punk, sensible dans le premier film, lorsque Marty radicalisait le rock’n roll, encore sage de Chuck Berry, à travers un solo grinçant et déstructuré, au cours duquel il se roulait par terre et frappait du pied les enceintes. La scène fusionnait alors un morceau de bravoure, digne du Jimi Hendrix de 1969 et sa reprise à Woodstock du Star-Spangled Banner (l’hymne national américain), avec une variation nihiliste et plus anarchiste des Sex Pistols: un condensé de dépense subversive qui, peut-être plus que la violence et la cupidité, est la virtualité d’overdose «No Future» dont Marty devait se purger.
Plutôt que de suivre l’exemple des enfants des Seventies, à la dérive dans Rumble Fish (Francis Ford Coppola, 1983)[14], Marty pouvait compter sur un autre héros éminemment reaganien – John Rambo – qui avait déjà opéré ce geste cathartique des années 1980. Avant son retour revanchard dans Rambo: First Blood Part II (George Pan Cosmatos, 1985), le premier Rambo: First Blood (Ted Kotcheff, 1982) a en effet connu deux fins tournées: la première, fidèle au roman des Seventies dont le film est adapté, voyait la machine de guerre Rambo abattue, sacrifiée par son colonel, après son déchaînement de violence contre la petite ville de Hope; la seconde, conservée au montage, le voit se rendre aux autorités et lui laisse la possibilité d’incarner la figure emblématique du survivant increvable des Eighties[15]. Pour conclure, l’axe analytique du cannibalisme et de la cannibalisation permet de poser le rapport entre les deux acteurs de cette pratique, en même temps qu’il ramasse leurs régimes dramaturgiques et d’historicité respectifs: le sacrifié (Seventies, moderne) et le survivant (Eighties, postmoderne); celui qui dépense sans compter et celui qui capitalise.
[1]Cité in J.-B. Thoret, 2013, 45.
[2]Le film American Graffiti se conclue d’ailleurs par des intertitres qui signalent aux spectateurs le sort ultérieur, parfois tragique, des personnages, dont l’un d’entre eux meurt au Vietnam. De la même manière, The Last Picture Show (Peter Bogdanovich, 1971), s’il prépare lui aussi les voyages temporels de Back to the Future, reste à voir comme un film mélancolique des Seventies.
[3]Nous reprenons à l’analyse du film par Michael D. Dwyer ce double usage du verbe «to fix».
[4]Lire l’analyse éclairante des différents usages de la chanson dans le film in M. D. Dwyer, 2015.
[5]Cité in C. Rodley, 2004, 12 (nous soulignons).
[6]Le lumpenproletariat désigne, pour Marx et Engels, le sous-prolétariat en haillons (autrement appelé la bohème en France), c’est-à-dire les membres déclassés, rebuts, vagabonds, prostituées, saltimbanques, escrocs ou criminels, souvent dépendants de la bourgeoise ou de l’aristocratie pour leur survie économique, dépourvus de conscience de classe et donc fidélité à la cause révolutionnaire, quand ils n’agissent pas directement en faveur de sa répression en se vendant à la réaction.
[7]J. Rancière, 2018, 26-27.
[8]William F. Buckley est un idéologue et journaliste ultra-conservateur américain qui a notoirement participé au maccarthysme et à l’émergence de la New Right dont Reagan s’est nourri.
[9]Milton Friedman est un économiste, membre des Chicago Boys, et père américain du néo-libéralisme.
[10]M. D. Dwyer, 2015, 36-37.
[11]G. Chamayou, 2018, 64-66.
[12]Entre autres articles sur le sujet, voir T. Christopher, 2016, disponible à l’adresse suivante: https://thedailybanter.com/2015/10/just-how-racist-is-back-to-the-future/ (consulté le 1er avril 2021). Voir également l’article de D. Faraci, 2013, disponible à l’adresse suivante: https://birthmoviesdeath.com/2013/08/28/black-to-the-future (consulté le 1er avril 2021).
[13]Pour reprendre le fameux concept du poète et philosophe Édouard Glissant.
[14]Voir le texte de G. Deleuze et F. Guattari, «Mai 68 n’a pas eu lieu» in G. Deleuze, 2003, 217.
[15]Cette ambivalence des deux fins, tranchée à l’issue du premier film et, selon nous, au moins dans le second, demeure en filigrane des sequels de Rambo, comme de la persona de Silvester Stallone moins uniformément reaganienne qu’on ne le croit, ainsi que l’a bien montré David Da Silva, plus encore dans la série de films Rocky.
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