Lancé il y a dix ans sur le cyberespace à l’usage des étudiants de l’Ivy League selon le modèle des sites de cotation «hot or not», Facebook est désormais le deuxième site le plus visité au monde après Google. Ayant dépassé la barre du milliard d’utilisateurs actifs en 2012, avec 350 millions de clichés téléversés quotidiennement pour près de 4,5 milliards de «likes» et un demi-petaoctet par jour de données, le médium social est devenu la plus grande base de données comportementales de la planète, en vue de sa plus haute exploitation commerciale (entré au Nasdaq en mai 2012, il est évalué à 134 milliards de dollars, pour un revenu annuel estimé de 5 milliards).
Emblème de «l’extase de la communication» baudrillardienne, utopie relationnelle ou signe d’une nouvelle tyrannie, voire germe d’un totalitarisme cool, Facebook est tour à tour exalté, soupçonné ou/et exécré, cumulant dégoût et fascination en un nouvel odi et amo catullien. Si quelques essais commencent à poindre, portés par l’aura de cela même qu’ils prétendent contester (en français: Facebook m’a tué, de A. Des Isnards et T. Zuber; Facebook, anatomie d’une chimère de J. Azam), il reste que, face à l’ampleur proprement excessive de ce phénomène qui est en train de changer (im)matériellement nos vies, la nécessité d’une véritable branche interdisciplinaire d’études facebookiennes se fait sentir. Comme nous l’avons fait pour Youtube, Popenstock est content de vous inviter à relever ce défi de plus en plus urgent si nous voulons véritablement cerner ce qui nous arrive: Penser Facebook.
Est-il besoin de citer la clairvoyante ouverture de La Société du Spectacle: «Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s’annonce comme une immense accumulation de spectacles.
L’ouvrage de Alain Ehrenberg L’individu incertain, paru en 1995, annonçait de façon prémonitoire ce qui, neuf ans plus tard, poussait Mark Zuckerberg à fonder Facebook.