Aux États-Unis, la littérature pour adolescents est désignée sous l’appellation «Young Adult Literature» (YAL). Plusieurs hypothèses pourraient expliquer le choix de cette dénomination. Le terme «young adult», bien que visant un lectorat plus jeune que ce qu’il laisse entendre, garantirait aux éditeurs une forme de protection devant d’éventuelles plaintes de la part de parents ou d’enseignants. Confondre ainsi l’adolescence et l’âge jeune adulte serait une façon de vieillir, symboliquement, l’«âge ingrat», et de s’engager du côté du crossover, cette pratique éditoriale permettant la double publication d’un livre: à la fois en format adulte et en format jeunesse. Le texte du livre crossover demeure identique; seul son aspect physique change, selon qu’il est destiné aux adultes ou aux adolescents. À ce sujet, une enquête états-unienne réalisée par Bowker en 2012 déterminait qu’une large part des lecteurs de YAL avait dix-huit ans et plus (Halverson). Interpellant des lecteurs aussi bien adolescents qu’adultes, la YAL ferait donc figure de crossover dans le champ actuel de la réception. Cette opération de double catégorisation représente aussi un avantage lucratif: en élargissant le bassin de lecteurs, les opportunités de vente sont décuplées. Plusieurs œuvres de YAL connaissent un tel succès qu’elles sont ensuite traduites et exportées pour devenir des best-sellers mondiaux (les séries Harry Potter, Hunger Games et Divergent, les ouvrages de John Green, ceux de Robert Cormier et de Rainbow Rowell, par exemple).
Mais quelles sont, alors, les spécificités du corpus young adult? En quoi son apparition sur la scène littéraire modifie-t-elle le portrait de la littérature jeunesse? Et quelles transformations formelles et thématiques induisent l’avènement de la YAL?
Ce contexte étant posé, ce dossier désire examiner les stratégies et techniques utilisées, en Young Adult Literature, qui rendent ce corpus si accessible aux différents lectorats.
La journée d’étude Transfictions et convergences en Young Adult Literature, Marie Demers (UdeM), Fanie Demeule (UQAM) et Maryse Sullivan (UOttawa), a eu lieu le 22 septembre 2017 à l’Université du Québec à Montréal.
Même si l’expression Young Adult Literature (ou Fiction) demeure imprécise –le genre désigne-t-il avant tout un public adolescent (13 à 17 ans) ou plus âgé (18 à 25 ans)?–, les enjeux de ce genre d’oeuvres sont généralement liés à la transition vers l’âge adulte et aux nouvelles responsabilités associées à cette période d’ouverture au monde.
En 1993, quinze ans avant la publication des Hunger Games et la vague de romans dystopiques des années 2000, l’américaine Lois Lowry publiait The Giver, premier tome de sa tétralogie de science-fiction.
Sherlock Holmes est une fiction continue depuis 1887: on ne compte plus les adaptations et les œuvres que ce personnage a influencées.
Comme l’explique Anne Besson dans son ouvrage théorique La fantasy, la forme cyclique désigne un ensemble de textes «reliés par le retour de personnages apparentés ou appartenant au même “monde”» (2007: 153).
Depuis la première moitié du XXe siècle, l’apparition des médias de masse a causé l’émergence de nouvelles modalités de consommation des produits culturels, et notamment l’expansion de la culture participative.
De profondes mutations politiques et culturelles ont transformé le paysage social de la fin du XXe siècle.